J'ai vu Sisyphe heureux
- Par evagamonal
- Le 28/01/2021
- Dans Nous avons aimé
"J'ai vu Sisyphe heureux" est un recueil de trois récits poétiques en français et en grec, écrits dans une langue simple, douce et profonde comme une confidence chuchotée lors d'une veillée.
"Cette maison n'a besoin de rien" est le premier récit. Il raconte comment, après la mort d'un modeste pêcheur, sa veuve et ses enfants maintiennent à flot la barque de leur humble famille, envers et contre toutes les difficultés, dignement. Extrait :
"Au bout de quelques jours
Fatiguée par les visistes
Ayant peur que sa fierté
Ne mette la ville en colère
Elle a accroché sur la porte du jardin
Un petit panneau
"Vous êtes les bienvenus
Venez les mains vides
Cette maison n'a besoin de rien"
"J'ai vu Sisyphe heureux" est le deuxième récit. Il raconte le mariage heureux d'un couple des gens humbles, qui traversent un demi-siècle unis comme les doigts de la main, satisfaits de leur vie sobre et généreuse. Leur pas de porte est un lieu d'échanges joyeux et harmonieux. Après leur mort, la narratrice repasse souvent devant chez eux. Extrait :
"Quatre murs seuls qui tournent au gris
Gonflés d'humidité comme s'ils retenaient des larmes
Et une petite cour déserte collée au mur de la maison voisine
Il fallait bien du talent pour en faire un paradis
Leur départ
Signe la fin d'un monde
Vivre pauvre sans être rustre
Avoir peu et tout offrir
Garder le meilleur pour l'ami ou l'étranger
Reprendre tous les matins le même chemin
Savoir que toute la vie sera ainsi
Et en sourire
Moi
J'ai vu
Sisyphe heureux."
"Le centaure de notre enfance" est le 3è récit. Il fait le portrait de Fotis, un habitant de la petite ville où la narratrice a grandi, doux rêveur ami des enfants et des animaux, marginal solitaire et philanthrope au coeur de la cité, clochard céleste, prophète ignoré comme Cassandre mais dont la disparition crée une véritable déflagration parmi les habitants. Quelle description émouvante du jour de son enterrement ! Extrait :
Comme ils marchaient dans le froid noir
Ivres et heureux
Ils ont tourné leur regard vers le firmament
Et ils ont imaginé Fotis errer
Dans ce ciel mité par des milliers d'étoiles
Il y trouverait bientôt
Ont-ils pensé
Ses habitudes éternelles
Entre rires et larmes
Ils faisaient des suppositions
Sur son poste céleste
Les pêcheurs l'imaginaient
Occupé à raccommoder des nuages
Et un archéologue
Qui connaissait la passion de Fotis pour tout ce qui était ancien
L'a nommé
Gardien des étoiles éteintes.